Le vampire par John William POLIDORIJohn William Polidori 7 septembre 1795-24 aoĂ»t 1821, fils de Gaetano Polidori, Ă©tait un Ă©crivain italo-anglais. On lui attribue la paternitĂ© du vampirisme dans la littĂ©rature suite Ă sa nouvelle Le Vampire The Vampyre, parue en 1819."La superstition qui sert de fondement Ă ce conte est universelle dans lâOrient. Elle est commune chez les Arabes ; cependant elle ne se rĂ©pandit chez les Grecs quâaprĂšs lâĂ©tablissement du christianisme, et elle nâa pris la forme dont elle est revĂȘtue que depuis la sĂ©paration des Ă©glises grecque et latine. Ce fut alors quâon commença Ă croire que le cadavre dâun latin ne pouvait pas se corrompre, sâil Ă©tait inhumĂ© en terre grecque, et Ă mesure que cette croyance sâĂ©tendit, elle donna naissance aux histoires Ă©pouvantables de morts qui sortaient de leurs tombeaux, et suçaient le sang des jeunes filles distinguĂ©es par leur beautĂ©. Elle pĂ©nĂ©tra dans lâOuest avec quelques variations ; on croyait en Hongrie, en Pologne, en Autriche, en BohĂȘme, que les vampires pompaient pendant la nuit une certaine quantitĂ© du sang de leurs victimes, qui maigrissaient Ă vue dâoeil, perdaient leurs forces et pĂ©rissaient de consomption, tandis que ces buveurs de sang humain sâengraissaient, et que leurs veines se distendaient Ă un tel point, que le sang sâĂ©coulait par toutes les issues de leurs corps, et mĂȘme par tous leurs journal de Londres de mars 1733 contient un rĂ©cit curieux et croyable dâun cas particulier de vampirisme quâon prĂ©tend ĂȘtre arrivĂ© Ă Madreygea en Hongrie. Le commandant en chef et les magistrats de cette place affirmĂšrent positivement et dâune voix unanime, aprĂšs une exacte information, quâenviron cinq ans auparavant un certain Heyduke, nommĂ© Arnold Paul, sâĂ©tait plaint quâĂ Cassovia, sur les frontiĂšres de la Servie turque, il avait Ă©tĂ© tourmentĂ© par un vampire, mais quâil avait Ă©chappĂ© Ă sa rage en mangeant un peu de terre quâil avait prise sur le tombeau du vampire, et en se frottant lui-mĂȘme de son sang. Cependant cette prĂ©caution ne lâempĂȘcha pas de devenir vampire Ă son tour ; car, vingt ou trente jours aprĂšs sa mort et son enterrement, plusieurs personnes se plaignirent dâavoir Ă©tĂ© tourmentĂ©es par lui ; on dĂ©posa mĂȘme que quatre personnes avaient Ă©tĂ© privĂ©es de la vie par ses attaques ; pour prĂ©venir de nouveaux malheurs, les habitants, ayant consultĂ© leur Hadagai1, exhumĂšrent le cadavre et le trouvĂšrent comme on le suppose dans tous les cas de vampirisme frais et sans aucunes traces de corruption ; sa bouche, son nez et ses oreilles Ă©taient teints dâun sang pur et vermeil. Cette preuve Ă©tait convaincante ; on eut recours un remĂšde accoutumĂ©. Le corps dâArnold fut percĂ© dâun pieu, et lâon assure que, pendant cette opĂ©ration, il poussa un cri terrible, comme sâil eĂ»t Ă©tĂ© vivant. Ensuite on lui coupa la tĂȘte quâon brĂ»la avec son corps, et on jeta ses cendres dans son tombeau. Les mĂȘmes mesures furent adoptĂ©es Ă lâĂ©gard des corps de ceux qui avaient pĂ©ri victimes du vampire, de peur quâelles ne le devinssent Ă leur tour et ne tourmentassent les rapporte ici ce conte absurde, parce que, plus que tout autre, il nous a semblĂ© propre Ă Ă©claircir le sujet qui nous occupe. Dans plusieurs parties de la GrĂšce, on considĂšre le vampirisme comme une punition qui poursuit, aprĂšs sa mort, celui qui sâest rendu coupable de quelque grand crime durant sa vie. Il est condamnĂ© Ă tourmenter de prĂ©fĂ©rence par ses visites infernales les personnes quâil aimait le plus, celles Ă qui il Ă©tait uni par les liens du sang et de la tendresse. Câest Ă cela que fait allusion un passage du Giaour But first on earth, as Vampire sent, etc. Mais dâabord envoyĂ© sur ta terre comme un vampire, ton corps sâĂ©lancera de sa tombe ; effroi du lieu de ta naissance, tu iras sucer le sang de toute ta famille ; et dans lâombre de la nuit tu tariras les sources de la vie dans les veines de ta fille, de ta soeur et de ton Ă©pouse. Pour combler lâhorreur de ce festin barbare qui doit rassasier ton cadavre vivant, tes victimes reconnaĂźtront leur pĂšre avant dâexpirer ; elles te maudiront et tu les maudiras. Tes filles pĂ©riront comme la fleur passagĂšre ; mais une de ces infortunĂ©es Ă qui ton crime sera fatal, la plus jeune, celle que tu aimais le mieux, tâappellera du doux nom de pĂšre. En vain ce nom brisera ton coeur ; tu seras forcĂ© dâaccomplir ta tĂąche impie, tu verras ses belles couleurs sâeffacer de ses joues, la derniĂšre Ă©tincelle de ses yeux sâĂ©teindre, et sa prunelle dâazur se ternir en jetant sur toi un dernier regard ; alors ta main barbare arrachera les tresses de ses blonds cheveux ; une de ses boucles tâeĂ»t paru autrefois le gage de la plus tendre affection, mais maintenant elle sera pour toi un souvenir de son cruel supplice ! Ton sang le plus pur souillera tes lĂšvres frĂ©missantes et tes dents agitĂ©es dâun tremblement convulsif. Rentre dans ton sombre sĂ©pulcre, partage les festins des Goules et des Afrites, jusquâĂ ce que ces monstres fuient avec horreur un spectre plus barbare quâeux ! »Southey a aussi introduit dans son beau poĂšme de Thalaza, une jeune Arabe, Oneiza, qui, devenue vampire, Ă©tait sortie du tombeau pour tourmenter son amant chĂ©ri ; mais on ne peut supposer que ce fĂ»t une punition de ses crimes, car elle est reprĂ©sentĂ©e dans tout le poĂšme comme un modĂšle dâinnocence et de puretĂ©. Le vĂ©ridique Tournefort raconte longuement dans ses voyages des cas Ă©tonnants de vampirisme dont il prĂ©tend ĂȘtre le tĂ©moin oculaire. Calmet, dans son grand ouvrage sur le vampirisme, en rapportant de nombreuses anecdotes qui en expliquent les effets, a donnĂ© plusieurs dissertations savantes oĂč il prouve que cette erreur est aussi rĂ©pandue chez les peuples barbares que chez les nations pourrait ajouter plusieurs notes aussi curieuses quâintĂ©ressantes sur cette superstition horrible et singuliĂšre ; mais elles dĂ©passeraient les bornes dâun avant-propos. On remarquera en finissant, que quoique le nom de Vampire soit le plus gĂ©nĂ©ralement reçu, il a dâautres synonymes dont on se sert dans les diffĂ©rentes parties du monde, comme Vroucolacha, Vardoulacha, Goule, Broucoloka, Au milieu des cercles de la haute sociĂ©tĂ© que le retour de lâhiver rĂ©unit Ă Londres, on voyait un seigneur aussi remarquable par ses singularitĂ©s que par son rang distinguĂ©. Spectateur impassible de la gaĂźtĂ© qui lâenvironnait, il semblait ne pouvoir la partager. Si la beautĂ©, par un doux sourire, fixait un instant son attention, un seul de ses regards la glaçait aussitĂŽt et remplissait dâeffroi ces coeurs oĂč la lĂ©gĂšretĂ© avait Ă©tabli son trĂŽne. La source de la terreur quâil inspirait Ă©tait inconnue aux personnes qui en Ă©prouvaient les effets ; quelques-uns la cherchaient dans ses yeux gris et ternes, qui ne pĂ©nĂ©traient pas jusquâau fond du coeur, mais dont la fixitĂ© laissait tomber un regard sombre dont on ne pouvait supporter le poids. Ces singularitĂ©s le faisaient inviter dans toutes les maisons tout le monde souhaitait de le voir. Les personnes accoutumĂ©es aux sensations fortes, et qui Ă©prouvaient le poids de lâennui, Ă©taient charmĂ©es dâavoir en leur prĂ©sence un objet de distraction qui pĂ»t attirer leur attention. MalgrĂ© la pĂąleur mortelle de son visage que ne coloraient jamais ni lâaimable incarnat de la pudeur, ni la rougeur dâune vive Ă©motion, la beautĂ© de ses traits fit naĂźtre Ă plusieurs femmes coquettes le dessein de le captiver ou dâobtenir de lui au moins quelques marques de ce quâon appelle affection. Lady Mercer, qui depuis son mariage avait souvent donnĂ© prise Ă la malignitĂ© par la lĂ©gĂšretĂ© de sa conduite, se mit sur les rangs, et employa tous les moyens pour en ĂȘtre remarquĂ©e. Ce fut en vain lorsquâelle se tenait devant lui, quoique ses yeux fussent en apparence fixĂ©s sur elle, ils semblaient ne pas lâapercevoir. On se moqua de son impudence et elle renonça Ă ses prĂ©tentions. Si telle fut sa conduite envers cette femme galante, ce nâest pas quâil se montrait indiffĂ©rent aux attraits du beau sexe ; mais la rĂ©serve avec laquelle il parlait Ă une Ă©pouse vertueuse et Ă une jeune fille innocente laissait croire quâil professait pour elles un profond respect. Cependant son langage passait pour sĂ©duisant ; et soit que ces avantages fissent surmonter la crainte quâil inspirait, soit que sa haine apparente pour le vice le fit rechercher, on le voyait aussi souvent dans la sociĂ©tĂ© des femmes qui sont lâhonneur de leur sexe par leurs vertus domestiques, que parmi celles qui se dĂ©shonorent par leurs peu prĂšs dans le mĂȘme temps arriva Ă Londres un jeune homme nommĂ© Aubrey ; orphelin dĂšs son enfance, il Ă©tait demeurĂ© avec une seule soeur, en possession de grands biens. AbandonnĂ© Ă lui mĂȘme par ses tuteurs, qui bornant leur mission Ă conserver sa fortune, avaient laissĂ© le soin de son Ă©ducation Ă des mercenaires, il sâappliqua bien plus Ă cultiver son imagination que son jugement. Il Ă©tait rempli de ces sentiments romanesques dâhonneur et de probitĂ© qui causent si souvent la ruine des jeunes gens sans expĂ©rience. Il croyait que la vertu rĂ©gnait dans tous les coeurs et que la Providence nâavait laissĂ© le vice dans le monde que pour donner Ă la scĂšne un effet plus pittoresque, comme dans les romans. Il ne voyait dâautres misĂšres dans la vie des gens de la campagne que dâĂȘtre vĂȘtus dâhabits grossiers, qui cependant prĂ©servaient autant du froid que des vĂȘtements plus somptueux, et avaient en outre lâavantage de fournir des sujets piquants Ă la peinture par leurs plis irrĂ©guliers et leurs couleurs variĂ©es. Il prit, en un mot, les rĂȘves des poĂštes pour les rĂ©alitĂ©s de la vie. Il Ă©tait bien fait, libre et opulent Ă ces titres, il se vit entourĂ©, dĂšs son entrĂ©e dans le monde, par la plupart des mĂšres qui sâefforçaient dâattirer ses regards sur leurs filles. Celles-ci par leur maintien composĂ© lorsquâil sâapprochait dâelles, et par leurs regards attentifs lorsquâil ouvrait les lĂšvres, lui firent concevoir une haute opinion de ses talents et de son mĂ©rite. AttachĂ© comme il Ă©tait au roman de ses heures solitaires, il fut Ă©tonnĂ© de ne trouver quâillusion dans les peintures sĂ©duisantes contenues dans les ouvrages dont il avait fait son Ă©tude. Trouvant quelque compensation dans sa vanitĂ© flattĂ©e, il Ă©tait prĂšs dâabandonner ses rĂȘves, lorsquâil rencontra lâĂȘtre extraordinaire que nous avons dĂ©peint plus se plut Ă lâobserver ; mais il lui fut impossible de se former une idĂ©e distincte du caractĂšre dâun homme entiĂšrement absorbĂ© en lui-mĂȘme, et qui ne donnait dâautre signe de ses rapports avec les objets extĂ©rieurs quâen Ă©vitant leur contact. Son imagination, entraĂźnĂ©e par tout ce qui flattait son penchant pour les idĂ©es extravagantes, ne lui permit pas dâobserver froidement le personnage quâil avait sous les yeux, mais elle forma bientĂŽt le hĂ©ros dâun roman. Aubrey fit connaissance avec lord Ruthven, lui tĂ©moigna beaucoup dâĂ©gards, et parvint enfin Ă ĂȘtre toujours remarquĂ© de lui. Peu Ă peu, il appris que les affaires de sa seigneurie Ă©taient embarrassĂ©es, et quâil se disposait Ă voyager. DĂ©sireux de connaĂźtre Ă fond ce caractĂšre singulier qui avait jusquâalors excitĂ© sa curiositĂ© sans la satisfaire, Aubrey fit entendre Ă ses tuteurs que le temps Ă©tait verni de commencer ces voyages, qui depuis tant de gĂ©nĂ©rations ont Ă©tĂ© jugĂ©s nĂ©cessaires pour faire avancer Ă grands pas les jeunes gens dans la carriĂšre du vice. Ils apprennent Ă Ă©couter sans rougir le rĂ©cit des intrigues scandaleuses, quâon raconte avec vanitĂ© oĂč dont on fait le sujet de ses plaisanteries, selon quâon a mis plus ou moins dâhabiletĂ© Ă les conduire. Les tuteurs dâAubrey consentirent Ă ses dĂ©sirs. Il fit part aussitĂŽt de ses intentions Ă lord Ruthven et fut surpris de recevoir de lui sa proposition de lâaccompagner. FlattĂ© dâune telle marque dâestime de la part de celui qui paraissait nâavoir rien de commun avec les autres hommes, il accepta avec empressement, et dans peu de jours ils eurent traversĂ© le Aubrey nâavait pas eu lâoccasion dâĂ©tudier le caractĂšre de lord Ruthven, et maintenant mĂȘme, quoique la plupart des actions de sa seigneurie fussent exposĂ©es Ă ses regards, il avait de lâembarras Ă se former un jugement exact de sa conduite. Son compagnon de voyage poussait la libĂ©ralitĂ© jusquâĂ la profusion ; le fainĂ©ant, le vagabond, le mendiant recevaient de sa main au-delĂ de ce qui Ă©tait nĂ©cessaire pour satisfaire leurs besoins prĂ©sents. Mais Aubrey ne put sâempĂȘcher de remarquer quâil ne rĂ©pandait jamais ses aumĂŽnes sur la vertu malheureuse il la renvoyait toujours avec duretĂ©. Au contraire, lorsquâun vil dĂ©bauchĂ© venait lui demander quelque chose, non pour subvenir Ă ses besoins, mais pour sâenfoncer davantage dans le bourbier de son iniquitĂ©, il recevait un don considĂ©rable. Aubrey nâattribuait cette distinction quâĂ la plus grande importunitĂ© du vire qui lâemporte sur la timiditĂ© de la vertu indigente. Cependant les rĂ©sultats de la charitĂ© de sa seigneurie firent une vive impression sur son esprit ceux qui en Ă©prouvaient les effets pĂ©rissaient sur lâĂ©chafaud ou tombaient dans la plus affreuse misĂšre, comme si une malĂ©diction y Ă©tait Bruxelles et dans toutes les villes oĂč ils sĂ©journĂšrent, Aubrey fut surpris de la vivacitĂ© avec laquelle son compagnon de voyage se jetait dans le centre de tous les vices Ă la mode. Il frĂ©quentait assidĂ»ment les maisons de ; il pariait, et gagnait toujours, exceptĂ© lorsque son adversaire Ă©tait un filou reconnu, et alors il perdait plus que ce quâil avait gagnĂ© ; mais ni la perte ni le gain nâimprimaient le plus lĂ©ger changement sur son visage impassible. Cependant lorsquâil Ă©tait aux prises avec un imprudent jeune homme ou un malheureux pĂšre de famille, il sortait de sa concentration habituelle ; ses yeux brillaient avec plus dâĂ©clat que ceux du chat cruel qui joue avec la souris expirante. En quittant une ville, il y laissait le jeune homme, arrachĂ© Ă la sociĂ©tĂ© dont il faisait lâornement, maudissant, dans la solitude, le destin qui lâavait livrĂ© Ă cet esprit malfaisant, tandis que plus dâun pĂšre de famille, le coeur dĂ©chirĂ© par les regards Ă©loquents de ses enfants mourant de faim, nâavait pas mĂȘme une obole Ă leur offrir pour satisfaire leurs besoins, au lieu dâune fortune naguĂšre considĂ©rable. Ruthven nâemportait aucun argent de la table de ; il perdait aussitĂŽt, avec celui qui avait dĂ©jĂ ruinĂ© plusieurs joueurs, cet or quâil venait dâarracher aux mains dâun malheureux. Ces succĂšs supposaient un certain degrĂ© dâhabiletĂ©, qui toutefois ne pouvait rĂ©sister Ă la finesse dâun filou expĂ©rimentĂ©. Aubrey se proposait souvent de faire des reprĂ©sentations Ă son ami, et de lâengager Ă se priver dâun plaisir qui causait la ruine de tous, sans lui apporter aucun profit. Il diffĂ©rait toujours dans lâespĂ©rance que son ami lui donnerait lâoccasion de lui parler Ă coeur ouvert. Cette occasion ne se prĂ©sentait jamais lord Ruthven, au fond de sa voiture, ou parcourant les paysages les plus pittoresques, Ă©tait toujours le mĂȘme ses yeux parlaient moins que ses lĂšvres. CâĂ©tait vainement quâAubrey cherchait Ă pĂ©nĂ©trer dans le coeur de lâobjet de sa curiositĂ© ; il ne pouvait dĂ©couvrir un mystĂšre que son imagination exaltĂ©e commençait Ă croire arrivĂšrent bientĂŽt Ă Rome, oĂč Aubrey perdit quelque temps son compagnon de voyage. Il le laissa dans la sociĂ©tĂ© dâune comtesse italienne, tandis que lui visitait les monuments et les antiquitĂ©s de lâancienne mĂ©tropole de lâunivers. Pendant quâil se livrait Ă ces recherches, il reçut des lettres de Londres quâil ouvrit avec une vive impatience la premiĂšre Ă©tait de sa soeur, elle ne lui parlait que de leur affection mutuelle ; les autres qui Ă©taient de ses tuteurs le frappĂšrent dâĂ©tonnement. Si lâimagination dâAubrey sâĂ©tait jamais formĂ© lâidĂ©e que le gĂ©nie du mal animait lord Ruthven, elle Ă©tait confirmĂ©e dans cette croyance par les lettres quâil venait de lire. Ses tuteurs le pressaient de se sĂ©parer dâun ami dont le caractĂšre Ă©tait profondĂ©ment dĂ©pravĂ©, et que ses talents pour la sĂ©duction ne rendaient que plus dangereux Ă la sociĂ©tĂ©. On avait dĂ©couvert que son mĂ©pris pour une femme adultĂšre Ă©tait loin dâavoir pour cause la haine de ses vices, mais quâil voulait jouir du plaisir barbare de prĂ©cipiter sa victime et la complice de son crime, du faite de la vertu dans le bourbier de lâinfamie et de la dĂ©gradation. En un mot, toutes les femmes dont il avait recherchĂ© la sociĂ©tĂ©, en apparence pour rendre hommage Ă leur vertu, avaient, depuis son dĂ©part, jetĂ© le masque de la pudeur, et ne rougissaient pas dâexposer aux regards du public la laideur de leurs se dĂ©termina Ă quitter un homme dont le caractĂšre, sous quelque point de vue quâil lâeĂ»t considĂ©rĂ©, ne lui avait jamais rien montrĂ© de consolant. Il rĂ©solut de chercher quelque prĂ©texte plausible pour se sĂ©parer de lui, en se proposant dâici lĂ de le surveiller de plus prĂšs, et de ne laisser aucune de ses actions sans la remarquer. Il se fit prĂ©senter dans la sociĂ©tĂ© que Ruthven frĂ©quentait, et sâaperçut bientĂŽt que le lord cherchait Ă sĂ©duire la fille de la comtesse. En Italie, les jeunes personnes paraissent peu dans le monde avant leur mariage. Il Ă©tait donc obligĂ© de dresser en secret ses batteries, mais les yeux dâAubrey le suivaient dans toutes ses dĂ©marches et dĂ©couvrirent bientĂŽt quâun rendez-vous Ă©tait donnĂ©e dont le rĂ©sultat devait ĂȘtre la perte dâune jeune fille aussi innocente quâinconsidĂ©rĂ©e. Sans perdre de temps, Aubrey se prĂ©sente Ă lord Ruthven, lui demande brusquement quelles sont ses intentions envers cette demoiselle, et lui annonce quâil a appris quâil devait avoir cette nuit mĂȘme une entrevue avec elle. Lord Ruthven rĂ©pond que ses intentions sont les mĂȘmes que celles de tout autre en pareille occasion. Aubrey le presse et veut savoir sâil songe au mariage. Ruthven se tait et laisse Ă©chapper un sourire ironique. Aubrey se retire et fait savoir par un billet Ă sa seigneurie quâil renonce Ă lâaccompagner dans le reste de ses voyages. Il ordonne Ă son domestique de chercher dâautres appartements et court apprendre Ă la comtesse tout ce quâil savait non seulement sur la conduite de sa fille, mais encore sur le caractĂšre de milord. On mit obstacle au rendez-vous. Le lendemain, lord Ruthven se contenta dâenvoyer son domestique Ă Aubrey pour lui faire savoir quâil adhĂ©rait entiĂšrement Ă ses projets de sĂ©paration ; mais il ne laissa percer aucun soupçon sur la part que son ancien ami avait eue dans le dĂ©rangement de ses avoir quittĂ© Rome, Aubrey dirigea ses pas vers la GrĂšce, et arriva bientĂŽt Ă AthĂšnes, aprĂšs avoir traversĂ© la pĂ©ninsule. Il sây logea dans la maison dâun grec. BientĂŽt il sâoccupa Ă rechercher les souvenirs dâune ancienne gloire sur ces monuments qui, honteux de ne raconter quâĂ des esclaves les exploits dâhommes libres, semblaient se cacher dans la terre ou se voiler de lichens variĂ©s. Sous te mĂȘme toit que lui vivait une jeune fille si belle, si dĂ©licate, quâun peintre lâaurait choisie pour modĂšle, sâil avait voulu retracer sur la toile lâimage des houris que Mahomet promet au fidĂšle croyant ; seulement ses yeux dĂ©celaient bien plus dâesprit que ne peuvent en avoir ces beautĂ©s Ă qui le prophĂšte refuse une Ăąme. Soit quâelle dansĂąt dans la plaine, ou quâelle courĂ»t sur le penchant des montagnes, elle surpassait la gazelle en grĂąces et en lĂ©gĂšretĂ©. Ianthe accompagnait Aubrey dans ses recherches des monuments antiques, et souvent le jeune antiquaire Ă©tait bien excusable dâoublier en la voyant une ruine quâil regardait auparavant comme de la derniĂšre importance pour interprĂ©ter un passage de sâefforcer de dĂ©crire ce que tout le monde sent, mais que personne ne saurait exprimer ? CâĂ©taient lâinnocence, la jeunesse, et la beautĂ©, que nâavaient flĂ©tris ni les salons ni les bals dâapparat. Tandis quâAubrey dessinait les ruines dont il voulait conserver le souvenir, elle se tenait auprĂšs de lui et observait les effets magiques du pinceau qui retraçait les scĂšnes du lieu de sa naissance. TantĂŽt elle lui reprĂ©sentait les danses de sa patrie, tantĂŽt elle lui dĂ©peignait avec lâenthousiasme de la jeunesse, la pompe dâune noce dont elle avait Ă©tĂ© tĂ©moin dans son enfance, tantĂŽt, faisant tomber la conversation sur un sujet qui paraissait plus vivement frapper le jeune homme, elle lui rĂ©pĂ©tait tous les contes surnaturels de sa nourrice. Le feu et la ferme croyance qui animait sa narration excitaient lâattention dâAubrey. Souvent, tandis quâelle lui racontait lâhistoire dâun vampire qui avait passĂ© plusieurs annĂ©es au milieu de ses parents et de ses amis les plus chers, et Ă©tait forcĂ© pour prolonger son existence de quelques mois, de dĂ©vorer chaque annĂ©e une femme quâil aimait, son sang se glaçait dans ses veines, quoiquâil sâefforçùt de rire de ces contes horribles et chimĂ©riques. Mais Ianthe lui citait le nom de plusieurs vieillards qui avaient dĂ©couvert un vampire vivant au milieu dâeux, aprĂšs quâun grand nombre de leurs parents et de leurs enfants eurent Ă©tĂ© trouvĂ©s morts avec les signes de la voracitĂ© de ces monstres. AffligĂ©e de son incrĂ©dulitĂ©, elle le suppliait dâajouter foi Ă son rĂ©cit, car on avait remarquĂ©, disait-elle, que ceux qui avaient osĂ© mettre en doute lâexistence des vampires en avaient trouvĂ© des preuves si terribles quâils avaient Ă©tĂ© forcĂ©s de lâavouer, avec la douteur la plus profonde. Elle lui dĂ©peignit la figure de ces monstres, telle que la tradition la lui avait montrĂ©e, et lâhorreur dâAubrey fut Ă son comble, lorsque cette peinture lui rappela exactement les traits de lord Ruthven ; il persista cependant Ă vouloir lui persuader que ses craintes Ă©taient imaginaires, mais en mĂȘme temps il Ă©tait frappĂ© de ce que tout semblait se rĂ©unir pour lui faire croire au pouvoir surnaturel de lord sâattachait de plus en plus Ă Ianthe ; son coeur Ă©tait touchĂ© de son innocence qui contrastait si fort avec lâaffectation des femmes au milieu desquelles il avait cherchĂ© Ă rĂ©aliser ses rĂȘves romanesques. Il trouvait ridicule la pensĂ©e de lâunion dâun jeune Anglais avec une grecque sans Ă©ducation, et cependant son amour pour Ianthe augmentait chaque jour. Quelquefois il essayait de se sĂ©parer dâelle pour quelque temps ; il se proposait dâaller Ă la recherche de quelques dĂ©bris de lâantiquitĂ©, rĂ©solu de revenir lorsquâil aurait atteint le but de sa course ; mais lorsquâil y Ă©tait parvenu, il ne pouvait fixer son attention sur tes ruines qui lâenvironnaient, tant son esprit conservait lâimage de celle qui semblait seule en droit dâoccuper ses pensĂ©es. Ianthe ignorait lâamour quâelle avait fait naĂźtre ; lâinnocence de ses amusements avait toujours le mĂȘme caractĂšre enfantin. Elle paraissait toujours se sĂ©parer dâAubrey avec rĂ©pugnance ; mais câĂ©tait seulement parce quâelle ne pouvait pas visiter les lieux quâelle aimait Ă frĂ©quenter, pendant que celui qui lâaccompagnait Ă©tait occupĂ© Ă dĂ©couvrir ou Ă dessiner quelque ruine qui avait Ă©chappĂ© Ă la main destructive du temps. Elle en avait appelĂ© au tĂ©moignage de ses parents au sujet des Vampires, et tous deux avaient affirmĂ© leur existence en pĂąlissant dâhorreur Ă ce seul nom. Peu de temps aprĂšs, Aubrey rĂ©solut de faire une de ses excursions qui ne devait le retenir que quelques heures ; lorsquâils apprirent le lieu oĂč il dirigeait ses pas, ils le suppliĂšrent de revenir avant la nuit, car il serait obligĂ© de passer par un bois oĂč. aucune considĂ©ration nâaurait pu retenir un Grec aprĂšs le coucher du soleil. Ils lui dĂ©peignirent ce lieu comme le rendez-vous des vampires pour leurs orgies nocturnes, et lui prĂ©dirent les plus affreux malheurs, sâil osait sây aventurer aprĂšs la fin du jour. Aubrey fit peu de cas de leurs reprĂ©sentations et souriait de leur frayeur ; mais lorsquâil les vit trembler Ă la pensĂ©e quâil osait se moquer de cette puissance infernale et terrible, dont le nom seul les glaçait de terreur, il garda le lendemain matin, lorsquâil se prĂ©parait Ă partir seul pour son excursion, Aubrey fut surpris de la consternation rĂ©pandue sur tous les traits de ses hĂŽtes et apprit avec Ă©tonnement que ses railleries sur la croyance de ces monstres affreux Ă©taient seules la cause de leur terreur. Au moment de son dĂ©part Ianthe sâapprocha de lui, et le supplia avec instance dâĂȘtre de retour avant que la nuit eĂ»t rendu Ă ces ĂȘtres horribles lâexercice de leur pouvoir. Il le promit. Cependant ses recherches lâoccupĂšrent Ă un tel point quâil ne sâaperçut pas que le jour Ă©tait Ă son dĂ©clin, et quâil ne remarqua pas un de ces nuages noirs, qui, dans ces climats brĂ»lants, couvrent bientĂŽt tout lâhorizon de leur masse Ă©pouvantable et dĂ©chargent leur rage sur les campagne dĂ©solĂ©es. Il monta Ă cheval, rĂ©solu de regagner par la vitesse de sa course le temps quâil avait perdu ; mais il Ă©tait trop tard. On connaĂźt Ă peine le crĂ©puscule dans les climats mĂ©ridionaux ; la nuit commença immĂ©diatement aprĂšs le coucher du soleil. Avant quâil eĂ»t fait beaucoup de chemin, lâorage Ă©clata dans toute sa furie ; les tonnerres rĂ©pĂ©tĂ©s avec fracas par les Ă©chos dâalentour faisaient entendre un roulement continuel, la pluie qui tombait par torrents eut bientĂŽt percĂ© le feuillage sous lequel il avait cherchĂ© un asile ; les Ă©clairs semblaient Ă©clater Ă ses pieds. Tout dâun coup son cheval Ă©pouvantĂ© lâemporta rapidement au travers de la forĂȘt, et ne sâarrĂȘta que lorsquâil fut harassĂ© de fatigue. Aubrey dĂ©couvrit Ă la lueur des Ă©clairs une chaumiĂšre qui sâĂ©levait au-dessus des broussailles qui lâenvironnaient. Il descendit de cheval et sây dirigea, espĂ©rant y trouver un guide qui le ramenĂąt Ă la ville, ou un asile contre les fureurs de la tempĂȘte. Comme il sâen approchait, le tonnerre, en cessant un moment de gronder, lui permit dâentendre les cris dâune femme mĂȘlĂ©s aux Ă©clats Ă©touffĂ©s dâun rire insultant ; mais rappelĂ© Ă lui par le fracas de la foudre qui Ă©clatait sur sa tĂȘte, il force la porte de la chaumiĂšre. Il se trouve dans une obscuritĂ© profonde ; cependant le son des mĂȘmes voix guide encore ses pas. On paraĂźt ne pas sâapercevoir de son entrĂ©e, quoiquâil appelle Ă grande cris ; en sâavançant, il heurte un homme qui le saisit, et une voix sâĂ©crie se rira-t-on encore de moi ? Un Ă©clat de rire succĂšde Ă ses paroles, il se sent alors fortement serrĂ© par une force plus quâhumaine ; rĂ©solu de vendre chĂšrement sa vie, il oppose de la rĂ©sistance ; mais câest en vain, il est bientĂŽt violemment renversĂ©. Sou ennemi se prĂ©cipitant sur lui, et appuyant son genou sur sa poitrine, portait dĂ©jĂ ses mains Ă sa gorge, lorsque la clartĂ© de plusieurs torches, pĂ©nĂ©trant par lâouverture qui donnait passage Ă la lumiĂšre du jour, le force dâabandonner sa victime, il se lĂšve aussitĂŽt, et sâĂ©lance dans la forĂȘt. On entendit le froissement des branches quâil heurtait dans sa fuite, et il disparut. La tempĂȘte Ă©tant apaisĂ©e, Aubrey, incapable de mouvement, parvint Ă se faire entendre ; les gens qui Ă©taient au dehors entrĂšrent ; la lueur de leurs torches Ă©claira les murailles nues et le chaume du toit noirci par des flocons de suie. Ă la priĂšre dâAubrey, ils cherchĂšrent la femme dont les cris lâavaient attirĂ©. Il demeura de nouveau dans les tĂ©nĂšbres ; mais quelle fut son horreur, lorsquâil reconnut dans un cadavre quâon apporta auprĂšs de lui la belle compagne de ses courses ! Il ferma les yeux, espĂ©rant que ce nâĂ©tait quâun fantĂŽme créé par son imagination troublĂ©e ; mais, lorsquâil les rouvrit, il aperçut le mĂȘme corps Ă©tendu Ă son cĂŽtĂ© ; ses lĂšvres et ses joues Ă©taient Ă©galement dĂ©colorĂ©es ; mais le calme de son visage la rendait aussi intĂ©ressante que lorsquâelle jouissait de la vie. Sou cou et son sein Ă©taient couverts de sang et sa gorge portait les marques des dents qui avaient ouvert sa veine. Ă cette vue, les Grecs, saisis dâhorreur, sâĂ©criĂšrent Ă la fois Elle est victime dâun vampire ! On fit Ă la hĂąte un brancard. Aubrey y fut dĂ©posĂ© Ă cĂŽtĂ© de celle lui avait Ă©tĂ© tant de fois lâobjet de ses rĂȘves. Visions brillantes et fugitives Ă©vanouies avec la fleur dâIanthe ! Il ne pouvait dĂ©mĂȘler ses pensĂ©es, son esprit Ă©tait engourdi et semblait craindre de former une rĂ©flexion ; il tenait Ă la main, presque sans le savoir, un poignard dâune forme extraordinaire quâon avait trouvĂ© dans la cabane. Ils rencontrĂšrent bientĂŽt diffĂ©rentes troupes que la mĂšre dâIanthe avait envoyĂ©es Ă la recherche de sa fille, dĂšs quâelle sâĂ©tait aperçue de son absence. Leurs cris lamentables Ă lâapproche de la ville, apprirent aux parents quâil Ă©tait arrivĂ© une catastrophe terrible. Il serait impossible de peindre leur dĂ©sespoir ; mais lorsquâils reconnurent la cause de la mort de leur fille, ils regardĂšrent tour Ă tour son corps inanimĂ© et Aubrey. Ils furent inconsolables et moururent tous les deux de fut mis au lit ; une fiĂšvre violente le saisit. Il fut souvent dans le dĂ©lire ; dans ces intervalles, il prononçait le nom de Ruthven et dâIanthe ; par une Ă©trange combinaison dâidĂ©es, il semblait supplier son ancien ami dâĂ©pargner lâobjet de son amour. Dâautres fois, il lâaccablait dâimprĂ©cations, et le maudissait comme lâassassin de la jeune fille. Lord Ruthven arriva Ă AthĂšnes Ă cette Ă©poque, et, on ne sait par quel motif, dĂšs quâil apprit lâĂ©tat dâAubrey, il vint habiter la mĂȘme maison que lui, et le soigna constamment. LorsquâAubrey sortit du dĂ©lire, lâaspect dâun homme dont les traits lui prĂ©sentaient lâimage dâun vampire, le frappa de terreur, mais Ruthven, par ses douces paroles, par son repentir de la faute qui avait causĂ© leur sĂ©paration, et encore plus par ses attentions, son inquiĂ©tude et ses soins assidus, lui rendit bientĂŽt sa prĂ©sence agrĂ©able. Il paraissait tout Ă fait changĂ© ce nâĂ©tait plus cet ĂȘtre apathique qui avait tant Ă©tonnĂ© Aubrey. Mais Ă mesure que celui-ci recouvra la santĂ©, le lord revint peu Ă peu Ă son ancien caractĂšre et Aubrey nâaperçut dans ses traits dâautre diffĂ©rence que le sourire dâune joie maligne qui venait quelquefois se jouer sur ses lĂšvres, tandis que son regard Ă©tait fixĂ© sur lui ; Aubrey nâen connaissait pas le motif, mais ce sourire Ă©tait frĂ©quent. Sur la fin de la convalescence du malade, lord Ruthven parut uniquement occupĂ©, tantĂŽt Ă considĂ©rer les vagues de cette mer quâaucune marĂ©e nâagite, amoncelĂ©es par la bise, tantĂŽt Ă observer la course de ces globes qui roulent, comme notre monde, autour du soleil immobile ; il semblait vouloir Ă©viter tous les coup terrible avait beaucoup affaibli les forces morales dâAubrey ; et cette vivacitĂ© dâimagination qui le distinguait autrefois semblait lâavoir abandonnĂ© pour jamais. Le silence et la solitude avaient autant de charmes pour lui que pour lord Ruthven. Mais cette solitude quâil aimait tant, il ne pouvait pas la trouver aux environs dâAthĂšnes ; sâil la cherchait au milieu des ruines quâil frĂ©quentait autrefois, lâimage dâIanthe se tenait auprĂšs de lui ; sâil la cherchait dans la foret, il la voyait encore errant au milieu des taillis, courant dâun pied lĂ©ger, ou occupĂ©e Ă cueillir la modeste violette, puis tout dâun coup elle lui montrait, en se retournant, son visage couvert dâune pĂąleur mortelle et sa gorge ensanglantĂ©e, tandis quâun sourire mĂ©lancolique errait sur ses lĂšvres dĂ©colorĂ©es. Il rĂ©solut de fuir une contrĂ©e oĂč tout lui rappelait des souvenirs amers. Il proposa Ă lord Ruthven, Ă qui il se sentait uni par les liens de la reconnaissance, de parcourir ces contrĂ©es de la GrĂšce que personne nâavait encore visitĂ©es. Ils voyagĂšrent dans toutes les directions, nâoubliant aucun lieu cĂ©lĂšbre et sâarrĂȘtant devant tous les dĂ©bris qui rappelaient un illustre souvenir. Cependant ils paraissaient occupĂ©s de tout autre chose que des objets quâils avaient sous les yeux. Ils entendaient beaucoup parler de brigands, mais ils commençaient Ă faire peu de cas de ces bruits, en attribuant lâinvention aux habitants qui avaient intĂ©rĂȘt Ă exciter ainsi la gĂ©nĂ©rositĂ© de ceux quâils protĂ©geraient contre ces prĂ©tendus dangers. NĂ©gligeant les avis des gens du pays, ils voyagĂšrent une fois avec un petit nombre de gardes quâils avaient pris plutĂŽt pour leur servir de guides que pour les dĂ©fendre. Au moment oĂč ils entraient dans un dĂ©filĂ© Ă©troit, dans le fond duquel roulait un torrent, dont le lit Ă©tait encombrĂ© dâĂ©normes masses de rocs qui sâĂ©taient dĂ©tachĂ©es des prĂ©cipices voisins, ils recommencĂšrent Ă se repentir de leur confiance ; car Ă peine toute leur troupe fut engagĂ©e dans cet Ă©troit passage, quâils entendirent le sifflement des balles au-dessus de leurs tĂȘtes, et un instant aprĂšs les Ă©chos rĂ©pĂ©tĂšrent le bruit de plusieurs coups de feu. AussitĂŽt leurs gardes les abandonnĂšrent, et coururent se placer derriĂšre des rochers, prĂȘts Ă faire feu du cĂŽtĂ© dâoĂč les coups Ă©taient partis. Lord Ruthven et Aubrey, imitant leur exemple, se rĂ©fugiĂšrent un moment Ă lâabri dâun roc avancĂ©, mais bientĂŽt, honteux de se cacher ainsi devant un ennemi dont les cris insultants les dĂ©fiaient dâavancer, se voyant dâabord exposĂ©s Ă une mort presque certaine, si quelques brigands grimpaient sur les rochers au-dessus dâeux et les prenaient par derriĂšre, ils rĂ©solurent dâaller Ă leur rencontre. Ă peine eurent-ils dĂ©passĂ© le roc qui les protĂ©geait, que lord Ruthven reçut une balle dans lâĂ©paule qui le renversa. Aubrey courut pour le secourir, et ne songeant pas a son propre pĂ©ril, il fut surpris de se voir entourĂ© par les brigands. Les gardes avaient mis bas les armes, dĂšs que lord Ruthven avait Ă©tĂ© la promesse lâune grande rĂ©compense, Aubrey engagea les brigands Ă transporter son ami blessĂ© dans une chaumiĂšre voisine. Il convint avec eux dâune rançon, et ne fut plus troublĂ© par leur prĂ©sence ; ils se contentĂšrent de garder lâentrĂ©e, jusquâau retour de leur camarade, qui Ă©tait allĂ© toucher la somme promise avec un ordre dâAubrey. Les forces de lord Ruthven sâaffaissĂšrent rapidement ; deux jours aprĂšs, la gangrĂšne se mit Ă sa blessure ; et la mort semblait sâavancer Ă grands pas. Sa conduite et son extĂ©rieur Ă©taient toujours les mĂȘmes. Il paraissait aussi insensible Ă sa douleur quâaux objets qui lâenvironnaient. Cependant vers la fin du jour son esprit parut fort agitĂ© ; ses yeux se fixaient souvent sur Aubrey, qui lui prodiguait ses soins avec la plus grande sollicitude. â Secourez-moi ! vous le pouvez... Sauvez... je ne dis pas ma vie ; rien ne peut la sauver ; je ne la regrette pas plus que le jour qui vient de finir ; mais sauvez mon honneur, lâhonneur de votre ami. » â Comment ? que voulez-vous dire ? Je ferai tout pour vous », rĂ©pondit Aubrey. â Je demande bien peu de chose... la vie mâabandonne... je ne puis tout vous expliquer... Mais si vous gardez le silence sur ce que vous savez de moi, mon honneur sera sans tache... et si pendant quelque temps on ignorait ma mort en Angleterre... et... ma vie. » â Tout le monde lâignorera. » â Jurez », cria le mourant en se levant avec force, jurez par tout ce que votre Ăąme rĂ©vĂšre, par tout ce quâelle craint, jurez que dâun an et un jour, vous ne ferez connaĂźtre Ă aucun ĂȘtre vivant mes crimes et ma mort, quoi quâil puisse arriver, quoi que vous puissiez voir ! » Ses yeux Ă©tincelants semblaient sortir de leur orbite. Je le jure », dit Aubrey. Lord Ruthven retomba sur son oreiller avec un rire affreux et il ne respirait se retira pour se reposer, mais il ne put dormir ; tous les Ă©vĂ©nements qui avaient marquĂ© ses relations avec cet homme se retraçaient Ă son esprit ; il ne savait pourquoi, lorsquâil se rappelait sou serment, un frisson glacĂ© courait dans ses veines, comme sâil eĂ»t Ă©tĂ© agitĂ© par un horrible pressentiment. Il se leva de grand matin, et au moment oĂč il entrait dans le lieu oĂč il avait laissĂ© le cadavre, il rencontra un des voleurs qui lui dit que, conformĂ©ment Ă la promesse quâils avaient faite Ă sa seigneurie, lui et ses camarades avaient transportĂ© son corps au sommet dâune montagne ; il ne trouva aucune trace du corps ni de ses vĂȘtements, quoique les voleurs lui jurassent quâils lâavaient dĂ©posĂ© sur le mĂȘme rocher quâils indiquaient. Mille conjectures se prĂ©sentĂšrent Ă son esprit, mais il retourna enfin, convaincu quâon avait enseveli le cadavre aprĂšs lâavoir dĂ©pouillĂ© de ce qui le dâun pays oĂč il avait Ă©prouvĂ© des malheurs si terribles, et oĂč tout conspirait Ă rendre plus profonde la mĂ©lancolie que des idĂ©es superstitieuses avaient fait naĂźtre dans soit Ăąme, il rĂ©solut de fuir et arriva bientĂŽt Ă Smyrne. Tandis quâil attendait un vaisseau qui devait le transporter Ă Otrante ou Ă Naples, il sâoccupa Ă mettre en ordre quelques effets qui avaient appartenu Ă lord Ruthven. Entre autres objets il trouva une cassette qui contenait plusieurs armes offensives plus ou moins propres Ă assurer la mort de la victime qui en Ă©tait frappĂ©e ; il y avait plusieurs poignards et sabres orientaux. Pendant quâil examinait leurs formes curieuses, quelle fut sa surprise de rencontrer un fourreau dont les ornements Ă©taient du mĂȘme goĂ»t que ceux du poignard trouvĂ© dans la fatale cabane ! Il frissonna pour mettre un terme Ă son incertitude, il courut chercher cette arme et dĂ©couvrit avec horreur quâelle sâadaptait parfaitement avec le fourreau quâil tenait dans la main. Ses yeux nâavaient pas besoin dâautres preuves ; il ne pouvait se dĂ©tacher du poignard. Aubrey aurait voulu rĂ©cuser le tĂ©moignage de sa vue ; mais la forme particuliĂšre de lâarme, les ornements de la poignĂ©e pareils Ă ceux du fourreau, dĂ©truisaient tous les doutes ; bien plus, lâun et lâautre Ă©taient tachĂ©s de quitta Smyrne et, en retournent dans sa patrie, il passa Ă Rome, oĂč il sâinforma de la jeune personne que lord Ruthven avait cherchĂ© Ă sĂ©duire. Ses parents Ă©taient dans la dĂ©tresse ; ils avaient perdu toute leur fortune, et on nâavait plus entendu parler de leur fille depuis le dĂ©part du lord. Lâesprit dâAubrey Ă©tait accablĂ© de tant dâhorreurs il craignait quâelle nâeĂ»t Ă©tĂ© la victime du meurtrier dâIanthe ! Toujours plongĂ© dans une sombre rĂȘverie, il ne semblait en sortir que pour presser les postillons, comme si la rapiditĂ© de sa course eĂ»t dĂ» sauver la vie Ă quelquâun qui lui Ă©tait cher. Enfin il arriva bientĂŽt Ă Calais ; un vent qui paraissait seconder sa volontĂ© le conduisit en peu dâheures sur les rivages de lâAngleterre ! Il courut Ă la maison de ses pĂšres, et oublia pour un moment, au milieu des embrassements de sa soeur, le souvenir du passĂ©. Ses caresses enfantines avaient autrefois gagnĂ© son affection, et aujourdâhui quâelle Ă©tait embellie des charmes et des grĂąces de son sexe, sa sociĂ©tĂ© Ă©tait devenue encore plus prĂ©cieuse Ă son Aubrey nâavait pas ces dehors qui sĂ©duisent et qui attirent les regards et les applaudissements dans les cercles et les assemblĂ©es. Elle ne possĂ©dait pas cette lĂ©gĂšretĂ© brillante qui nâexiste que dans les salons. Son oeil bleu ne respirait pas la vivacitĂ© dâun esprit enjouĂ© ; mais on voyait sây peindre cette douce mĂ©lancolie que le malheur nâa pas fait naĂźtre, mais qui rĂ©vĂšle une Ăąme soupirant aprĂšs un meilleur monde. Sa dĂ©marche nâĂ©tait pas lĂ©gĂšre comme celle de la beautĂ© qui poursuit un papillon ou un objet qui lâĂ©blouit par le vif Ă©clat de ses couleurs ; elle Ă©tait calme et rĂ©flĂ©chie. Lorsquâelle Ă©tait seule, le sourire de la joie ne venait jamais luire sur son visage ; mais quand son frĂšre lui exprimait son affection, quand il oubliait auprĂšs dâelle les chagrins qui troublaient son repos, qui aurait prĂ©fĂ©rĂ© Ă son sourire celui dâune beautĂ© voluptueuse ? Tous ses traits peignaient alors les sentiments qui Ă©taient naturels Ă son Ăąme. Elle nâavait que dix-huit ans, et nâavait pas encore paru dans la sociĂ©tĂ©, ses tuteurs ayant pensĂ© quâil convenait dâattendre le retour de son frĂšre, qui serait son protecteur. On avait dĂ©cidĂ© que la premiĂšre assemblĂ©e Ă la cour serait lâĂ©poque de son entrĂ©e dans le monde. Aubrey aurait prĂ©fĂ©rĂ© demeurer dans la maison pour se livrer sans rĂ©serve Ă sa mĂ©lancolie. Il ne pouvait pas prendre un grand intĂ©rĂȘt Ă toutes les frivolitĂ©s de ces rĂ©unions, lui qui avait Ă©tĂ© tourmentĂ© par tous les Ă©vĂ©nements dont il avait Ă©tĂ© le tĂ©moin ; mais il rĂ©solut de sacrifier ses goĂ»ts Ă lâintĂ©rĂȘt de sa soeur. Ils arrivĂšrent Ă Londres et se prĂ©parĂšrent Ă paraĂźtre le lendemain Ă lâassemblĂ©e qui devait avoir lieu Ă la rĂ©union Ă©tait nombreuse ; il nây avait pas eu de rĂ©ception Ă la cour depuis longtemps, et tous ceux qui Ă©taient jaloux de se rĂ©chauffer au sourire de la royautĂ© y Ă©taient accourus. Aubrey sây rendit avec sa soeur. Il se tenait dans un coin, inattentif Ă tout ce qui se passait autour de lui, et se rappelant avec une douleur amĂšre que câĂ©tait dans ce lieu mĂȘme quâil avait vu lord Ruthven pour la premiĂšre fois, tout Ă coup il se sent saisi par le bras, et une voix quâil reconnut trop bien retentit Ă son oreille Souviens-toi de ton serment ! Il osait Ă peine se retourner, redoutant de voir un spectre qui lâaurait anĂ©anti, lorsquâil aperçoit, Ă quelques pas de lui, le mĂȘme personnage qui avait attirĂ© son attention dans ce lieu mĂȘme, lors de sa premiĂšre entrĂ©e dans le monde. Il ne peut en dĂ©tourner ses yeux ; mais bientĂŽt ses jambes flĂ©chissent sous le poids de son corps, il est forcĂ© de prendre le bras dâun ami pour se soutenir, se fait jour Ă travers la foule, se jette dans sa voiture et rentre chez lui. Il se promĂšne dans sa chambre Ă pas prĂ©cipitĂ©s ; il couvre sa tĂȘte de ses mains, comme sâil voulait empĂȘcher que dâautres pensĂ©es ne jaillissent de son cerveau troublĂ©. Lord Ruthven encore devant lui... le poignard... son serment... tout se rĂ©unit pour bouleverser ses idĂ©es. Il se croit en proie Ă un songe affreux... un mort rappelĂ© Ă la vie ! Il pense que son imagination seule a prĂ©sentĂ© Ă ses regards le fantĂŽme de celui dont le souvenir le poursuit sans cesse. Toute autre supposition serait-elle possible ? Il retourne dans la sociĂ©tĂ© ; mais Ă peine veut-il faire quelques questions sur lord Ruthven, que son nom expire sur ses lĂšvres, et il ne peut rien apprendre. Quelque temps aprĂšs il conduit sa soeur dans la sociĂ©tĂ© dâun de ses proches parents. Il la laisse auprĂšs dâune dame respectable, et se retire Ă lâĂ©cart pour se livrer aux souvenirs qui le dĂ©vorent. Sâapercevant enfin que plusieurs personnes se retiraient, il sort de sa rĂȘverie et entre dans la salle voisine ; il y trouve sa soeur entourĂ©e dâun groupe nombreux, engagĂ© dans une conversation animĂ©e ; il veut sâouvrir un passage jusquâĂ elle, lorsquâune personne, quâil priait de se retirer un peu, se retourne et lui montre ces traits quâil abhorrait. AussitĂŽt Aubrey sâĂ©lance, saisit sa soeur par le bras, et lâentraĂźne dâun pas rapide ; Ă la porte de la rue, il se voit arrĂȘtĂ© par la foule des domestiques qui attendaient leurs maĂźtres ; tandis quâil passe au milieu dâeux, il entend encore cette voix trop connue lui rĂ©pĂ©ter tout bas Souviens-toi de ton serment ! Il nâose pas retourner ; mais il entraĂźne plus vivement sa soeur et arrive enfin dans sa fut sur le point de perdre lâesprit. Si autrefois le seul souvenir du monstre occupait son imagination, combien plus terrible devait ĂȘtre cette pensĂ©e, aujourdâhui quâil avait acquis la certitude de son retour Ă la vie ! Il recevait les soins de sa soeur sans en apercevoir câĂ©tait en vain quâelle lui demandait la cause de son brusque dĂ©part. Il ne lui rĂ©pondait que par quelques mots entrecoupĂ©s qui la glaçaient dâeffroi. Plus il rĂ©flĂ©chissait, plus son esprit sâĂ©garait. Son serment faisait son dĂ©sespoir ; devait-il laisser le monstre chercher librement une nouvelle victime ? devait-il le laisser dĂ©vorer ce quâil avait de plus cher, sans prĂ©venir les effets dâune rage, qui pouvait ĂȘtre assouvie sur sa propre soeur ? Mais quand il violerait son serment ; quand il dĂ©voilerait ses soupçons, qui ajouterait foi Ă son rĂ©cit ? Il pensa que sa main devait dĂ©livrer le monde dâun tel flĂ©au ; mais, hĂ©las ! il se souvint que le monstre se riait de la mort. Pendant quelques jours, il demeura dans cet Ă©tat enfermĂ© dans sa chambre ; ne voyant personne, et ne mangeant que ce que sa soeur lui apportait, en le conjurant, les armes aux yeux, de soutenir sa vie par pitiĂ© pour elle. Enfin, ne pouvant plus supporter le silence et a solitude, il quitta sa maison, et erra de rue en rue, pour fuir le fantĂŽme qui le poursuivait. Ses vĂȘtements Ă©taient nĂ©gligĂ©s, et il Ă©tait exposĂ© aussi souvent aux ardeurs du soleil quâĂ la fraĂźcheur des nuits. Dâabord il rentrait chez lui chaque soir mais bientĂŽt il se couchait lĂ oĂč la fatigue le forçait Ă sâarrĂȘter. Sa soeur, craignant pour sa sĂ»retĂ©, le faisait suivre par ses domestiques ; il se dĂ©robait Ă eux aussi vite que la pensĂ©e. Cependant sa conduite changea tout dâun coup. FrappĂ© de lâidĂ©e que son absence laissait ses amis exposĂ©s Ă la fureur dâun monstre quâils ne connaissaient pas, il rĂ©solut de rentrer dans la sociĂ©tĂ© pour surveiller de prĂšs lord Ruthven, et le dĂ©masquer malgrĂ© son serment, aux yeux de tous ceux qui vivraient dans son intimitĂ©. Mais lorsquâil entrait dans un salon, ses yeux Ă©taient hagards, il regardait avec un air soupçonneux ; son agitation intĂ©rieure perçait tellement au dehors que sa soeur fut enfin obligĂ©e de le prier dâĂ©viter une sociĂ©tĂ© qui lâaffectait si pĂ©niblement. Ses conseils furent inutiles ; alors ses tuteurs, craignant que sa raison ne sâaltĂ©rĂąt, crurent quâil Ă©tait temps dâemployer lâautoritĂ© que les parents dâAubrey leur avaient lui Ă©pargner les accidents et les souffrances auxquels il Ă©tait chaque jour exposĂ© dans ses courses vagabondes, et dĂ©rober aux yeux du public les marques de ce quâils prenaient pour de la folie, ils engagĂšrent un mĂ©decin Ă demeurer dans sa maison et Ă lui donner des soins assidus. Il parut Ă peine sâapercevoir de sa prĂ©sence, tant Ă©tait profonde la prĂ©occupation de son esprit Le dĂ©sordre de ses idĂ©es sâaccrut Ă un tel point, quâon fut obligĂ© de le renfermer dans sa chambre. Il demeurait plusieurs jours de suite dans un Ă©tat de stupeur, dâoĂč rien ne pouvait le faire sortir ; sa maigreur Ă©tait excessive ses yeux avaient un Ă©clat vitreux. La prĂ©sence de sa soeur avait seule le pouvoir dâexciter en lui quelques signes de souvenir et dâaffection. Alors il sâavançait brusquement vers elle, lui prenait les mains, jetait sur elle des regards qui la faisaient trembler, et sâĂ©criait Ah ! ne le touche pas ! au nom de lâamitiĂ© qui nous unit, ne tâapproche pas de lui ! » En vain elle lui demandait de qui il voulait parler, il ne rĂ©pondait que ces mots Câest vrai ! ce nâest que trop vrai ! » et il retombait dans le mĂȘme Ă©tat dâinsensibilitĂ©. Plusieurs mois se passĂšrent ainsi ; cependant, Ă mesure que lâannĂ©e sâĂ©coulait, ses moments dâaliĂ©nation devinrent moins frĂ©quents ; sa sombre mĂ©lancolie parut sâĂ©claircir par degrĂ©s. Ses tuteurs observĂšrent quâil comptait sur ses doigts un nombre dĂ©terminĂ©, et quâalors il temps avait fui, et lâon Ă©tait arrivĂ© au dernier jour de lâannĂ©e lorsquâun des tuteurs dâAubrey entra dans sa chambre, et sâentretint avec le mĂ©decin du malheur qui retenait son pupille dans une situation si dĂ©plorable, au moment oĂč sa soeur Ă©tait Ă la veille de se marier. AussitĂŽt lâattention dâAubrey sâĂ©veilla, il demanda avec inquiĂ©tude quel homme elle devait Ă©pouser. Ravis de celle marque dâun retour Ă la raison quâils nâosaient espĂ©rer, ils lui nommĂšrent le comte de Marsden. Aubrey parut charmĂ© dâentendre le nom de ce jeune homme, quâil croyait avoir connu dans la sociĂ©tĂ©, et il les Ă©tonna en leur exprimant le dĂ©sir dâassister aux noces et en demandant Ă voir sa soeur. Ils ne rĂ©pondirent rien, mais quelques moments aprĂšs, sa soeur fut auprĂšs de lui. Il Ă©tait encore sensible Ă son aimable sourire ; il la pressait sur son sein, lâembrassait avec transport. Miss Aubrey versait des larmes de joie en voyant son frĂšre renaĂźtre Ă la santĂ© et aux sentiments de lâamitiĂ© fraternelle. Il se mit Ă lui parler avec son ancienne chaleur et Ă la fĂ©liciter de son mariage avec un homme si distinguĂ© par son rang et ses bonnes qualitĂ©s ; tout Ă coup il aperçoit un mĂ©daillon suspendu sur sa poitrine, il lâouvre, et quelle est sa surprise en reconnaissant les traits du monstre qui avait en tant dâinfluence sur sa destinĂ©e. Il saisit le portrait avec fureur et le foule aux pieds. Sa soeur lui demande pour quel sujet il traite ainsi lâimage de son futur Ă©poux ; il la regarde et ne lâentend pas... il lui prend les mains ; son regard est frĂ©nĂ©tique. Jure-moi, sâĂ©crie-t-il, jure-moi de ne jamais tâunir Ă ce monstre ; câest lui... » Il ne peut achever... il croit entendre cette voix connue qui lui rappelle son serment ; il se retourne soudain, croyant que lord Ruthven Ă©tait derriĂšre lui ; mais il ne voit personne ; ses tuteurs et le mĂ©decin qui avaient tout entendu accourent, et pensant que câĂ©tait un nouvel accĂšs de folie, ils le sĂ©parent de miss Aubrey quâils engagent Ă se retirer. Il tombe Ă genoux, il les supplie de diffĂ©rer dâun jour le mariage. Ils prennent ses priĂšres pour une nouvelle preuve de dĂ©mence, tachent de le calmer et se Ruthven sâĂ©tait prĂ©sentĂ© chez Aubrey le lendemain de lâassemblĂ©e qui avait eu lieu Ă la cour ; mais on refusa de le voir comme toutes les autres personnes. Lorsquâil apprit la maladie dâAubrey, il comprit facilement quâil en Ă©tait la cause ; mais lorsquâil sut que son esprit Ă©tait aliĂ©nĂ©, sa joie fut si excessive quâil put Ă peine la cacher aux personnes qui lui avaient donnĂ© cette nouvelle. Il sâempressa de se faire introduire dans la maison de son ancien ami, et par des soins assidus, et lâaffection quâil feignait de porter Ă son frĂšre, il parvint Ă se faire aimer de miss Aubrey. Qui pouvait rĂ©sister au pouvoir de cet homme ? Il racontait avec Ă©loquence les dangers quâil avait courus. Il se peignait comme un ĂȘtre qui nâavait de sympathie sur la terre quâavec celle Ă qui il sâadressait. Il lui disait quâil nâavait connu le prix de la vie, que depuis quâil avait eu le bonheur dâentendre les sons touchants de sa voix ; en un mot, il sut si bien mettre en usage cet art funeste dont le serpent se servit le premier, quâil rĂ©ussit Ă gagner son affection. Le titre de la branche aĂźnĂ©e lui Ă©tant Ă©chu, il avait obtenu une ambassade importante, qui lui servit dâexcuse pour hĂąter son mariage. MalgrĂ© lâĂ©tat dĂ©plorable du frĂšre de sa future, il devait partir le lendemain pour le laissĂ© seul par le mĂ©decin et son tuteur, tĂącha de gagner les domestiques, mais ce fut en vain. Il demanda des plumes et du papier, on lui en apporta ; il Ă©crivit une lettre Ă sa soeur, oĂč il la conjurait, si elle avait Ă coeur sa fĂ©licitĂ©, son propre honneur, celui des auteurs de ses jours, qui voyaient en elle lâespĂ©rance de leur maison, de retarder de quelques heures un mariage qui devait ĂȘtre la source des malheurs les plus terribles. Les domestiques promirent de la lui remettre ; mais ils la donnĂšrent au mĂ©decin qui ne voulut pas troubler lâesprit de miss Aubrey par ce quâil regardait comme les rĂȘves dâun insensĂ©. La nuit se passa sans que les habitants de la maison se livrassent au repos. On concevra plus facilement quâon ne pourrait le dĂ©crire lâhorreur que ces prĂ©paratifs inspiraient au malheureux Aubrey. Le matin arriva, et le fracas des carrosses vint frapper ses oreilles. Aubrey fut dans un accĂšs de frĂ©nĂ©sie. La curiositĂ© des domestiques lâemporta sur leur vigilance ; ils sâĂ©loignĂšrent les uns aprĂšs les autres, le laissant sous la garde dâune vieille femme. Il saisit cette occasion, sâĂ©lance dâun saut vers la porte et se trouve en un instant au milieu de lâappartement oĂč tout le monde Ă©tait rassemblĂ©. Lord Ruthven lâaperçoit le premier ; il sâen approche aussitĂŽt, le saisit par le bras avec force, et lâentraĂźne hors du selon, muet de rage. Lorsquâils sont sur lâescalier, lord Ruthven lui dit tout bas Souviens-toi de ton serment, et sache que ta soeur est dĂ©shonorĂ©e, si elle nâest pas aujourdâhui mon Ă©pouse. Les femmes sont fragiles ! » Il dit et le pousse dans les mains des domestiques qui, rappelĂ©s par la vieille femme, Ă©taient Ă sa recherche. Aubrey ne pouvait plus se soutenir ; sa rage, forcĂ©e de se concentrer, causa la rupture dâun vaisseau sanguin on le porta dans son lit. Sa soeur ne sut point ce qui venait de se passer ; elle nâĂ©tait pas dans le salon lorsquâil y entra et le mĂ©decin ne voulut pas lâaffliger par ce spectacle. Le mariage fut cĂ©lĂ©brĂ© et les nouveaux Ă©poux quittĂšrent faiblesse dâAubrey augmenta ; lâeffusion abondante du sang produisit les symptĂŽmes dâune mort prochaine. Il fit appeler ses tuteurs et lorsque minuit eut sonnĂ©, il leur raconta avec calme ce que le lecteur vient de lire, et aussitĂŽt il vola au secours de miss Aubrey, mais lorsquâon arriva, il Ă©mit trop tard Lord Ruthven avait disparu et le sang de la soeur dâAubrey avait Ă©teint la soif dâun Vampire."
28décembre 2020. La petite pilule bleue fait des émules depuis sa mise en circulation en 1998. Destiné aux hommes pour lutter contre les troubles de l'érection, le
La maman du petit David doit se rendre Ă lâhĂŽpital pour une opĂ©ration du dos. Ce sont les vacances de PĂąques et il nây a personne pour le garder.â Tante Charlotte va t'accueillir durant mon sĂ©jour Ă lâhĂŽpital, lui dit Maman.â Tante Charlotte ? Mais je ne la connais pas ! rĂ©pondit le petit David, terrifiĂ© Ă lâidĂ©e dâĂȘtre sĂ©parĂ© de sa maman pour aller chez une inconnue.â Tante Charlotte est la sĆur de ton pauvre Papa, mon chĂ©ri. Elle a vĂ©cu de nombreuses annĂ©es Ă lâĂ©tranger, câest pour cela que tu ne lâas jamais rencontrĂ©e. Si câest la sĆur de Papa, elle doit ĂȘtre gentille ma Tata », se dit David, au fond de lui-mĂȘme. Son papa, un vaillant pompier, avait pĂ©ri dans les flammes lors dâun incendie. Depuis, David et sa maman vivaient seuls. Enfin, non, pas vraiment... Il y avait aussi le chien Bouboule, le fidĂšle toutou au pelage marron et blanc. Le meilleur ami de David qui avait Ă©tĂ© lĂ pour le consoler quand son papa avait disparu. Maman Catherine terminait de prĂ©parer la valise de son petit garçon quand la sonnerie de la porte dâentrĂ©e retentit.â Va ouvrir David, cela doit ĂȘtre Tante Charlotte. David sâempressa dâaller ouvrir, impatient de dĂ©couvrir cette femme qui devait ĂȘtre aussi gentille que son papa. Quelle ne fĂ»t pas sa surprise quand il ouvrit la porte ! Une grande femme, non, une gĂ©ante, apparĂ»t devant lui. AffublĂ©e de grosses lunettes avec des verres double Ă©paisseur, les cheveux coupĂ©s trĂšs courts et vĂȘtue dâune robe informe ressemblant aux rideaux du salon de Maman Catherine...â Bon...Bonjour Tata, bredouilla David.â Bonjour mon garçon, rĂ©pondit-elle dâune voie aigĂŒe et forte. Appelle-moi Tante Charlotte. Ce sont les bĂ©bĂ©s qui disent Tata. David sentit les larmes lui monter. Il allait ĂȘtre sĂ©parĂ© de sa maman et de plus, il devait rester chez une dame qui nâavait rien de commun avec son pĂšre. Lui qui lâespĂ©rait souriante, affectueuse, aimante, il dĂ©couvrit une tante peu aimable et autoritaire. Maman Catherine boucla la valise, embrassa fort son fils et avec quelques sanglots dans la voix, lui assura que tout de passerait bien. David serra fort sa maman et siffla Bouboule. Le chien apparĂ»t, la queue remuante, avec sa laisse dans la gueule.â Ah non, pas question ! Je ne veux pas de chien chez moi ! cria Tante Charlotte. David commença Ă pleurer et sa maman prit sa dĂ©fense.â Il nâa jamais Ă©tĂ© sĂ©parĂ© de Bouboule. Peux-tu faire une exception pour cette fois-ci ? Tante Charlotte soupira et accepta tant bien que mal que Bouboule se joigne Ă eux. AprĂšs de longues embrassades avec sa mĂšre, David suivit Tante Charlotte dans sa petite auto. Le trajet de quelques heures se dĂ©roula dans le silence. MĂȘme Bouboule ne bougea pas, comme sâil savait quâil devait se faire tout petit au cours de ce sĂ©jour... La maison de Tante Charlotte Ă©tait une ravissante petite maison situĂ©e Ă la campagne. Elle avait mĂȘme des lapins, ce qui rĂ©conforta David. Ah, elle aime quand mĂȘme les animaux ! ». Une fois quâil fĂ»t installĂ© dans sa chambre, Tante Charlotte dĂ©posa sur le bureau un cahier.â Voici tes devoirs pour aujourdâhui. Ta maman mâa dit que tu avais des difficultĂ©s en calcul, j'ai donc mis davantage dâopĂ©rations que de grammaire.â Mais je ne peux pas aller jouer dehors ? demanda le petit garçon.â Quand tu auras fini, rĂ©pliqua-t-elle. On dirait une maĂźtresse d'Ă©cole », pensa-t-il. ContrariĂ©, David sâinstalla au bureau et commença les exercices. Au bout de quelques minutes, il entendit des pas. Il se retourna et vit une petite fille. HabillĂ©e dâune robe Ă fleurs et coiffĂ©e de nattes, elle devait avoir environ six ans. Mais elle avait surtout un petit air trĂšs malicieux...â Salut, moi câest LĂ©onie. Je suis la fille de Tante Charlotte. Enfin, pas sa vraie fille, elle mâa adoptĂ©e.â Moi câest David, jâai dix ans et voici Bouboule, mon meilleur ami. La petite fille caressa le chien qui fĂ»t ravi dâĂȘtre flattĂ©. David Ă©tait enchantĂ© dâavoir une cousine avec qui partager ses jeux. Mais avant, il devait terminer ses devoirs...â Quand jâaurai terminĂ© mes devoirs, on pourra jouer ensemble ?â Oh, laisse tomber tes devoirs, tu les finiras plus tard. Maman est partie chez la voisine et elles sont si bavardes que cela va durer des heures. Viens avec moi, je vais te faire dĂ©couvrir le jardin ! Toujours obĂ©issant, David hĂ©sita. Et puis zut, les devoirs attendront ! Il Ă©tait en vacances aprĂšs tout ! LĂ©onie lâentraĂźna dans le jardin oĂč elle lui fit dĂ©couvrir le potager, les massifs de fleurs. Elle en cueillit pour dĂ©corer le collier de Bouboule et lui donna une carotte.â Mais ce nâest pas une fille ! sâexclama David. Et il ne mange pas de carottes, ce nâest pas un lapin !â Mais câest pour quâil ait une bonne vue, rĂ©pliqua LĂ©onie.â Comment ça ?â Eh bien oui, as-tu dĂ©jĂ vu un lapin avec des lunettes ? Les deux enfants Ă©clatĂšrent de rire. Cela faisait du bien au petit David de retrouver sa joie dâenfant. LĂ©onie lâemmena ensuite voir les lapins. Ils prirent chacun un bĂ©bĂ© dans les bras pour les cĂąliner.â Comment sâappellent les gros lapins ? demanda David.â Le papa sâappelle Potiron et la maman, Mirou, rĂ©pondit LĂ©onie. David se prit dâaffection pour ces animaux et se demanda si sa maman accepterait quâil ait lui aussi un petit lapin. Bouboule remuait la queue en les regardant, son instinct de chien de chasse se rĂ©veillait. Lâheure du dĂźner approcha. Tante Charlotte ne vĂ©rifia pas les devoirs de son neveu. Ouf, se dit-il, mais je vais les terminer avant de me coucher, on ne sait jamais... ». AprĂšs le dĂźner qui se composa notamment dâun bol de soupe que les enfants nâapprĂ©ciĂšrent guĂšre, Tante Charlotte les somma dâaller au lit. Il nâĂ©tait que vingt heures trente et Ă©tant donnĂ© que câĂ©tait les vacances, David pensait quâils auraient pu regarder un peu la tĂ©lĂ©vision.â Il nây en a pas ici, dĂ©clara Tante Charlotte. La lecture est bien plus bĂ©nĂ©fique que toutes ces sĂ©ries violentes. Les enfants filĂšrent donc au lit. David termina ses devoirs et ensuite, alla se coucher mais il ne trouvait pas le sommeil. Le lit Ă©tait trop grand, trop froid mais surtout, le bisou du soir de sa maman lui manquait. Il Ă©tait prĂȘt Ă pleurer lorsquâil entendit les petits pas de LĂ©onie dans la chambre. Elle se glissa dans son lit et il vit alors quâelle tenait dans les mains un jeu Ă©lectronique.â Câest ma copine Juju qui me lâa prĂȘtĂ© pour les vacances. Tu veux jouer ? Les deux cousins jouĂšrent Ă attraper des piĂšces pour tenter de sauver la princesse des griffes du dragon. Ils chuchotaient, riaient quand tout Ă coup, ils entendirent Tante Charlotte sâĂ©crier â Mon Dieu, les toilettes sont encore bouchĂ©es, ce nâest pas possible ! Le vidangeur a encore mal fait son travail ! LĂ©onie rit et se confia Ă David â Avant dâaccuser le vidangeur, elle devrait se demander oĂč disparaissent les rouleaux vides de papier toilette ! Quelle coquine cette LĂ©onie ! Elle en jouait des tours Ă sa maman qui ne se doutait de rien ! Il lâapprĂ©ciait beaucoup mais nâosait pas lui demander ce qui Ă©tait arrivĂ© Ă ses vrais parents et dans quelles circonstances Tante Charlotte lâavait adoptĂ©e. Il pensa quâil valait mieux poser la question Ă Maman Catherine. Le lendemain, aprĂšs la corvĂ©e des devoirs, car LĂ©onie nây Ă©chappait pas Ă©galement, les enfants passĂšrent leur temps Ă jouer dehors. LĂ©onie emprunta » la laque de sa mĂšre pour faire briller le poil de Bouboule. Cette derniĂšre remarqua que le chien avait un poil trĂšs brillant.â Je ne lâavais pas remarquĂ© avant, dit-elle. Les deux enfants pouffĂšrent de rire discrĂštement. Si Tante Charlotte savait que sa bombe de laque Ă©tait passĂ©e par lĂ ... Le soir, elle servit au dĂźner de la viande. David Ă©tait ravi, il redoutait un nouveau bol de soupe. Quand il goĂ»ta son assiette, il trouva la viande tendre et dĂ©licieuse.â Câest drĂŽlement bon, quâest-ce que câest comme viande ?â Câest du lapin, rĂ©pondit LĂ©onie avec un petit sourire moqueur, câest Potiron. David recracha immĂ©diatement le morceau de viande et se mit Ă pleurer.â Je ne mange pas les lapins que je connais ! sâĂ©cria-t-il en larmes. Il courut jusquâĂ sa chambre et se jeta sur le lit. Tante Charlotte gronda LĂ©onie â Ce nâest pas trĂšs gentil mon enfant, tu aurais pu dire les choses autrement. Ton cousin est trĂšs sensible. LĂ©onie se sentit honteuse. Jusque lĂ , câĂ©tait sa mĂšre qui Ă©tait passĂ©e pour la mĂ©chante et lĂ , câĂ©tait elle. Elle rejoignit son cousin, sâassit sur le bord du lit et sâexcusa â Excuse-moi David, je ne voulais pas de te faire de peine. Tu sais, ici Ă la campagne, on Ă©lĂšve les lapins pour les manger. Jâaurais dĂ» te prĂ©venir. David sĂ©cha ses larmes et vit que LĂ©onie Ă©tait profondĂ©ment dĂ©solĂ©e. Il lui sourit et lui pardonna.â Je ne tâen veux pas mais je peux tâassurer quâĂ partir de ce jour, je ne mangerai plus de lapin, je les aime trop ! Les quelques jours suivants passĂšrent dans la joie et la bonne humeur, mĂȘme Tante Charlotte se radoucit, mais elle nâoublia pas pour autant de donner des devoirs. LĂ©onie apprit Ă David Ă construire une cabane, Ă bĂȘcher le potager, et plein dâautres choses encore. Le jour du dĂ©part arriva. David boucla sa valise, impatient de retrouver sa maman mais aussi un peu triste de quitter sa cousine avec qui il avait passĂ© tant de bons moments. Avant de partir, LĂ©onie lui tendit une boite Ă chaussures dont le couvercle Ă©tait percĂ© de trous.â Tiens, câest pour toi, câest en souvenir de ton sĂ©jour chez nous, lui dit-elle. David ouvrit la boĂźte et dĂ©couvrit un petit lapin au pelage marron. Il sourit Ă LĂ©onie et Ă Tante Charlotte et les remercia vivement â Merci pour ce cadeau, mais jâespĂšre que vous nâavez pas mis dans la boĂźte la recette du lapin en cocotte ? Ils Ă©clatĂšrent tous les trois de rire. David nâavait jamais vu sa tante rire de bon cĆur et cela lui fit Ă©normĂ©ment plaisir. Les deux cousins se serrĂšrent fort dans les bras et LĂ©onie proposa Ă David de revenir aux vacances dâĂ©tĂ©.â Oui, avec grand plaisir, dit-il, mais avec Maman cette fois-ci. David monta dans la voiture et fit coucou Ă LĂ©onie jusquâĂ temps quâil ne la voie plus. Le trajet se passa en silence comme Ă lâaller mais dans une atmosphĂšre plus dĂ©tendue. ArrivĂ© devant lâimmeuble, David aperçut sa maman qui lâattendait. Elle semblait fatiguĂ©e par son opĂ©ration mais heureuse de retrouver son petit garçon. Il se jeta dans ses bras et sâempressa de lui prĂ©senter son nouveau compagnon Ă quatre pattes quâil avait baptisĂ© Caramel.â Tout sâest bien passĂ© mon chĂ©ri ? lui demanda-t-elle.â Oui Maman, ne tâinquiĂšte pas, et je souhaite mĂȘme retourner chez Tante Charlotte. Maman Catherine remercia Tante Charlotte dâavoir accueilli le petit garçon et il fĂ»t mĂȘme surpris quand elle dit â Il a Ă©tĂ© adorable mĂȘme sâil ne termine pas ses devoirs en temps et en heure... David rougit. En fait, elle avait bien vĂ©rifiĂ© ses devoirs le premier jour quand il Ă©tait parti jouer dehors mais nâavait rien dit. Elle lui fit un clin dâĆil complice et il se dit quâen fin de compte, elle nâĂ©tait pas si mĂ©chante que ça, Tante Charlotte... Elle embrassa Maman Catherine avant de partir, Ă©bouriffa les cheveux du petit garçon en guise dâaffection et fit mĂȘme une caresse Ă Bouboule qui en redemanda. AprĂšs son dĂ©part, David demanda Ă sa maman â Pourquoi tu ne mâavais pas parlĂ© de LĂ©onie ?â CâĂ©tait pour te faire une surprise. Apparemment, vous vous ĂȘtes bien entendus ?â Oh oui ! Mais je nâai pas osĂ© lui demander ce qui Ă©tait arrivĂ© Ă ses parents.â Comment ça ? demanda Maman, surprise.â Et bien oui, elle mâa dit quâelle avait Ă©tĂ© adoptĂ©e.â Mais non, sâexclama Maman, LĂ©onie tâa racontĂ© des bĂȘtises, Tante Charlotte est sa vraie maman ! David sourit en pensant Ă LĂ©onie quelle sacrĂ©e farceuse ! Mais au fond de lui-mĂȘme, depuis le dĂ©but, il savait que LĂ©onie Ă©tait bien de sa famille car elle avait toutes les qualitĂ©s de son Papa souriante, affectueuse, aimante...Vous aimerez aussi !Nouvelles La BoĂźte Ă cauchemarsFabres Constant Note de l'Ă©diteur ce texte peut choquer les lecteurs les plus large boĂźte en fer noir, qui repose au sommet de l'Ă©tagĂšre. Sally prĂ©fĂšre ne pas la regarder plus longtemps ... 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. 214 467 333 186 425 513 781 186
une femme arrive chez son amant durant un orage